Comment le rap des années 90 a-t-il influencé la société ?

Les artistes de rap ont été décrits comme portant une critique sociale et politique dans la sphère publique. Cette fonction a été désignée comme l’une des essences de la musique rap dans les premiers travaux universitaires français sur le genre musical. Amateurs et prescripteurs du genre ont également alimenté ces controverses sur l’authenticité d’un rap nécessairement conscient, c’est-à-dire au plus près des problèmes sociaux et politiques. Des rappeurs eux-mêmes ont thématisé cette injonction en reprenant par exemple la question : Qui prétend faire du rap sans prendre position? L’observation des mondes du rap dans différents pays montre qu’il existe une diversité de scènes plus ou moins critiques ou engagées qui obtiennent toutes la légitimité de se dénommer rap. Dès les années 1980, aux États-Unis comme en France, l’engagement politique des rappeurs ne constitue pas une condition de l’appartenance au genre musical. Il ne s’agit pas seulement de comprendre ce qu’il y a de politique dans l’expression publique d’une critique artistique argumentée, mais de voir de quelle manière la participation des rappeurs aux mouvements qu’ils défendent a été, ou non, un mariage fécond.

Le rap français s’ouvre aujourd’hui à de nouvelles sonorités et rythmes variés tels que le jazz, le funk ou encore le reggae pour créer une richesse musicale unique et inspirée. Les éléments d’influence du rap Us sur le rap français, ou le rap européen en général d’ailleurs, se manifestent dans l’utilisation de samples et de beats emblématiques souvent empruntés à des titres célèbres ou encore à d’autres genres musicaux dont le funk et le jazz. Puis, de célèbres producteurs américains tels que Dr. Dre, DJ Premier ou encore Pete Rock ont inspiré leurs homologues français à se lancer dans la création de sonorités plus originales et percutantes. Quant aux thématiques abordées par les rappeurs français tels que MC Solaar, Diam’s, Sniper ou Sefyu, elles sont généralement centrées autour des enjeux sociaux et culturels. Malgré l’intégration de références à leur propre contexte, le choix de ces thématiques démontre une fois encore l’influence américaine sur les artistes français. L’influence du rap US sur son homologue français est encore très présente, poussant certains fans à craindre une possible disparition de l’identité du rap français à peine instaurée. À contrario, certains accueillent cette inspiration comme une richesse créative : c’est effectivement sous l’influence du Dirty South, du Trapp et du Drill, des styles de rap purement américains, que le rap français a réussi à créer son propre style, dont l’iconique afro-trap, mené par MHD. Aujourd’hui encore, de nouveaux sous-genres émergents témoignent d’une évolution dynamique et d’une diversité enrichissant le paysage musical et l’identité du rap français. Le rap s’était frayé petit à petit un chemin aux oreilles des auditeurs français, sa démocratisation a surtout été marquée par l’apparition de pionniers tels que IAM et NTM dans les années 90. Dès leur premier contact avec le rap, ces groupes ont su parfaitement allier les influences musicales américaines aux thématiques parlant à la culture française, évitant ainsi de déporter bêtement une tendance étrangère.

Le rap s’est peu à peu imposé comme la nouvelle pop – voire la nouvelle variété – pour toute une génération. Désormais le genre musical le plus écouté par les jeunes, le hip-hop est de loin la musique préférée des moins de 24 ans. Les MCs caracolent largement en tête des ventes. En 2021, les artistes masculins les plus écoutés dans l’Hexagone sur la plate-forme Spotify étaient tous, sans exception, des rappeurs. Un succès qui fait dire à Jérôme Fourquet et Jean-Laurent Cassely, dans La France sous nos yeux, que le rap a « (presque) remplacé la variété ».